Favoriser l’inclusion dans les cours de laboratoire

Favoriser l’inclusion dans les cours de laboratoire

ALLYSON MACLEAN

Table des matières

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Favoriser l’inclusion dans les cours de laboratoire

Autrices et contributrices :

Allyson MacLean

Dominique Daniels

Océanne Comtois

Victoria Ogden

Allison O’Rourke

Sophie Tomlin

Remarque à l’intention du personnel enseignant utilisant la présente ressource

Groupe de personnes de tous les horizons

Chers amis, chères amies! Nous vous invitons cordialement à utiliser la présente ressource et à nous faire savoir si vous l’avez intégrée dans votre programme d’études. Comme nous souhaitons la bonifier, nous recevrons avec joie tous vos commentaires. Nous vous prions de communiquer avec la Dre Allyson MacLean (amaclea3@uottawa.ca) si vous souhaitez contribuer au texte. Merci.

Autres ouvrages de la série :

Inclusive education: simple strategies to improve equity and embrace diversity. Auteurs : Alison Flynn et Jeremy Kerr.  Anglais

Enseignement à distance : un guide pour les assistant.e.s d’enseignement. Auteurs : Meredith Allen, Alisha Szozda, Jeremy Kerr et Alison Flynn. Français | Anglais

Le présent projet est rendu possible grâce à un financement du gouvernement de l’Ontario et au soutien qu’offre eCampusOntario à la Stratégie pour l’apprentissage virtuel.

Renseignements sur eCampusOntario

La société sans but lucratif eCampusOntario est financée par le gouvernement de l’Ontario. Il s’agit d’un centre d’excellence de l’apprentissage en ligne et assisté par la technologie pour l’ensemble des collèges et universités financés par des fonds publics de l’Ontario. Il a entrepris l’ambitieuse mission d’étendre l’accès aux études et à la formation postsecondaires en Ontario. Le présent manuel fait partie de la Bibliothèque libre d’eCampusOntario, qui offre des ressources d’apprentissages gratuites sur une vaste gamme de sujets. Ces manuels libres peuvent être choisis par le personnel enseignant pour des cours, téléchargés par des apprenant.e.s sur leurs appareils électroniques, ou imprimés. Il est possible de personnaliser ces ressources libres et gratuites pour répondre à un vaste éventail de besoins en matière d’apprentissage. Nous invitons le personnel enseignant à examiner ces ressources et à les adapter afin de les utiliser dans le cadre de cours.

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Améliorer l’accessibilité des laboratoires

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Introduction

La présente ressource propose des lignes directrices générales sur l’amélioration de l’accessibilité des cours en laboratoire. Elle met particulièrement l’accent sur le soutien de l’apprentissage des étudiant.e.s ayant un handicap physique. Les personnes handicapées sont sous-représentées dans les disciplines scientifiques. Des étudiant.e.s ayant une déficience physique pourraient même s’abstenir de suivre des cours scientifiques, notamment en raison des préoccupations suscitées par la nature relativement inaccessible des laboratoires scientifiques. Les étudiant.e.s en situation de handicap représentent une faible minorité de la population étudiante, mais il convient de souligner que la mise en œuvre de pratiques d’enseignement inclusive peut profiter à l’ensemble des apprenant.e.s, quelles que soient leurs capacités. Les laboratoires d’enseignement constituent, par nature, des milieux d’apprentissage où des espaces mal conçus ou des pratiques dangereuses peuvent non seulement miner l’accessibilité et l’apprentissage, mais aussi, dans le pire des cas, représenter un danger pour chaque étudiant.e ou toute autre personne dans la classe.

Les lignes directrices qui suivent ont été élaborées en collaboration avec le Centre des étudiant e s ayant un handicap de l’Université d’Ottawa. Elles s’inspirent également d’entretiens menés auprès d’étudiant.e.s de premier cycle de la Faculté des sciences ayant divers handicaps et portant sur les expériences vécues par ces dernières en laboratoire. Il convient de souligner que chaque personne est unique, tout comme chaque handicap. La présente ressource propose des conseils généraux visant à améliorer l’accessibilité des laboratoires d’enseignement, mais il convient toujours de consulter directement les personnes à propos de leurs handicaps, ainsi que des spécialistes de l’aide à l’apprentissage et des professionnel.le.s de la santé, selon les besoins.

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Handicap : importance de la perspective et du contexte

Ne supposez pas mes capacités. Citation d’Océanne Comtois, diplômée du programme en sciences de la vie et aveugle au sens de la loi.Océanne Comtois, diplômée du programme en sciences de la vie et aveugle au sens de la loi.

Éléments importants à retenir

  • Les handicaps s’inscrivent dans un vaste spectre, et il faut tenir compte du milieu d’apprentissage lors de l’évaluation de l’effet d’un handicap sur l’apprentissage d’un.e étudiant.e.
  • Les laboratoires d’enseignement sont des milieux d’apprentissage particuliers pouvant poser des défis inhabituels pour les étudiant.e.s en situation de handicap.
  • Lors de la détermination du moyen le plus efficace pour favoriser l’apprentissage en laboratoire, il faut consulter sans hésiter chaque étudiant.e à propos de ses (in)capacités.

Un handicap est généralement défini comme étant un problème physique ou mental de longue durée limitant la capacité d’une personne à interagir avec d’autres gens ou le milieu. Cette définition nécessite toutefois une nuance importante, puisque chaque handicap s’inscrit dans un vaste spectre qui comprend les personnes pouvant ignorer leur déficience (handicap inconnu ou non diagnostiqué) et celles ayant un handicap difficile à percevoir par simple observation (que l’on nomme « handicap caché »). Selon la perspective adoptée, les handicaps peuvent aussi être considérés comme des éléments représentant simplement l’une des extrémités d’un spectre englobant les capacités de toutes les personnes. À titre d’exemple, il faut considérer qu’un.e étudiant.e ayant un trouble d’apprentissage s’inscrit dans un continuum de capacités d’apprentissage inhérentes à une population étudiante et qu’il n’appartient pas à un groupe distinct de personnes séparées des apprenant.e.s « normaux ». Le point de vue d’une personne est aussi indispensable pour déterminer si elle s’identifie comme étant handicapée ou non. Les membres de la communauté Sourde (majuscule) regroupent les personnes qui sont habituellement nées sans audition, qui maîtrisent le langage des signes en tant que première langue et qui partagent une culture commune. Ces membres peuvent considérer que leur incapacité d’entendre n’est pas un handicap et qu’ils possèdent plutôt un moyen de communication primaire différent des autres. Les personnes qui s’identifient comme étant sourdes (s minuscule) sont plus susceptibles d’avoir perdu leur capacité d’entendre dans leurs jeunes années et de considérer cette perte comme un handicap.

Certains handicaps limitent considérablement la capacité d’une personne à apprendre ou à interagir avec tous les milieux d’apprentissage ou dans ces milieux. Dans d’autres cas, un handicap peut n’avoir pratiquement aucune incidence sur l’apprentissage dans un milieu donné, mais produire un effet notable sur l’acquisition de connaissances dans un autre contexte.  En d’autres termes, le contexte est important, et il faut en tenir compte lors de l’évaluation des moyens pouvant soutenir le plus efficacement l’apprentissage. Cet aspect vaut en particulier pour l’apprentissage en laboratoire, parce que les laboratoires d’enseignement sont des milieux d’apprentissage particuliers pouvant poser des défis inhabituels pour les étudiant.e.s.  Un.e étudiant.e ayant une vision faible peut exceller dans ses études en classe grâce à des technologies d’assistance, mais il est peu probable que de telles technologies soient disponibles et adaptées à l’apprentissage dans un laboratoire d’enseignement. À l’inverse, un.e étudiant.e souffrant d’un trouble du spectre de l’autisme (TSA) pourrait être désavantagé lors d’une collaboration étroite avec d’autres collègues de classe dans le cadre d’un projet de groupe, mais n’avoir aucune difficulté à accomplir les tâches demandées dans un laboratoire de chimie. Un.e étudiant.e pourrait donc être considéré.e comme étant en situation de handicap et nécessiter une mesure d’adaptation dans un milieu donné (p. ex., en laboratoire), mais pas dans un autre (p. ex., en classe). Dans les faits, cette complexité constitue un atout, puisqu’elle signifie qu’il est souvent possible d’améliorer l’apprentissage en appliquant de manière proactive une stratégie de diversification des méthodes d’enseignement, des devoirs et des évaluations de l’apprentissage (pour d’autres détails sur la manière d’y parvenir, veuillez consulter la ressource 4).

Lors de la détermination du moyen le plus efficace pour favoriser l’apprentissage en laboratoire, il faudrait consulter sans hésiter chaque étudiant.e à propos de ses (in)capacités. Trop souvent, le personnel enseignant risquent de commettre l’erreur de supposer les limitations en fonction de sa connaissance générale de la nature d’un handicap, concluant ainsi à tort qu’un.e étudiant.e en situation de handicap pourrait ne pas atteindre l’objectif d’un cours alors que cet objectif est à sa portée. À titre d’exemple, un.e étudiant.e aveugle au sens de la loi pourrait tout de même être en mesure de discerner des couleurs et des formes et de s’en servir en tant que repères visuels pour accomplir les tâches demandées et participer aux activités en laboratoire. À l’inverse, le personnel enseignant pourrait se tromper en supposant l’existence de capacités supérieures chez un.e étudiant.e et lui imposer ainsi des attentes déraisonnables ou irréalistes. Un.e étudiant.e en situation de handicap qui éprouve des douleurs articulaires chroniques ou qui est aux prises avec une instabilité articulaire pourrait donner l’impression de pouvoir se déplacer « normalement » en laboratoire, mais être incapable de se tenir debout sans douleur pendant les deux ou trois heures habituelles d’un cours en laboratoire.

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Difficultés invisibles des étudiant.e.s en situation de handicap

Un laboratoire peut poser des défis inhabituels pour des étudiant.e.s en situation de handicap, mais il est fort probable que ceux-ci déjà surmonté de nombreux obstacles avant de mettre les pieds dans un laboratoire d’enseignement. Voici donc une liste non exhaustive des difficultés que peuvent éprouver des étudiant.e.s en situation de handicap durant leurs études et qui s’inspirent des nombreuses heures d’entretiens avec des étudiant.e.s de premier cycle à propos de leurs expériences. En ayant ces défis à l’esprit, il est plus facile de trouver les meilleures façons de les aider à atteindre leurs objectifs.

Il faut du temps pour obtenir des mesures d’adaptation.  Le personnel enseignant devrait savoir (surtout en début d’année académique) que le traitement des demandes de mesures d’adaptation universitaires peut exiger plusieurs semaines. Veuillez avoir cette réalité à l’esprit si des étudiant.e.s vous disent avoir besoin de mesures d’adaptation n’ayant pas encore été officiellement documentées par l’établissement. Il faut aussi se rappeler que des étudiant.e.s (particulièrement celles et ceux ayant des déficiences cognitives ou des troubles d’apprentissage) composent peut-être avec un nouveau diagnostic, révélé en raison des difficultés associées au fait de vivre pour la première fois à l’extérieur d’un foyer familial soutenant. Ces étudiant.e.s pourraient avoir plus de difficulté à trouver les mesures d’adaptation les plus efficaces pour soutenir leur apprentissage et connaîtront probablement moins le processus à suivre pour obtenir des mesures d’adaptation.

Il peut être difficile d’arriver en classe à temps.  Les campus universitaires peuvent être très vastes, et l’horaire des cours ne tient pas toujours compte des difficultés que peuvent éprouver des étudiant.e.s lors de leurs déplacement d’un endroit à l’autre afin d’arriver à temps à leurs cours. Une étudiante à mobilité réduite m’a envoyé l’horaire de ses cours pour y jeter un coup d’œil. J’ai été renversée de constater qu’elle devrait parcourir 1,1 km d’un bout à l’autre du campus en 10 minutes, alors que Google estimait ce déplacement à 14 minutes pour une personne sans mobilité restreinte. Après son deuxième cours, elle devait encore parcourir 1,2 km (estimation du déplacement par Google à 15 minutes pour une personne physiquement apte) afin de se rendre à un endroit situé près de l’immeuble de son premier cours. Malgré tous ses efforts, elle arrivait souvent en retard aux deux cours, et tous ces déplacements l’épuisaient inutilement. Si vous voyez des étudiant.e.s ayant de la difficulté à arriver à temps, envisager de demander un changement de local.  Il faut, à tout le moins, vous assurer de ne JAMAIS dépasser le temps prévu pour le cours, puisqu’un tel dépassement permet difficilement à l’ensemble des étudiant.e.s de se rendre à leur prochain cours à temps et désavantage de façon disproportionnée les étudiant.e.s en situation de handicap.

Dans bien des pays, il est difficile de se déplacer sur les campus en hiver en raison de la neige et de la glace. Dans certains cas, ces conditions posent un tel problème que des étudiant.e.s en situation de handicap évitent de s’inscrire à des cours exigeant une présence sur le campus en hiver. L’avènement des cours hybrides ou en ligne durant la pandémie de la COVID-19 a offert à beaucoup d’étudiant.e.s en situation de handicap un accès sans précédent à leurs cours, et ce, peu importe les conditions météorologiques.  Envisagez d’enregistrer vos cours sur une plateforme comme Zoom, dans la mesure du possible, et de proposer un lien vers ces cours.

Exactitude du sous-titrage et terminologie scientifique. Si vous avez déjà activé la fonction de transcription en direct de Zoom en donnant un cours, vous avez certainement constaté qu’elle est mal adaptée à la terminologie scientifique. Le terme « apoptose » devient « a pop dose », et « xanthomonas » se transforme en « gens tôt Mona », par exemple. L’inclusion judicieuse de termes dans vos diapositives durant un cours permet d’en clarifier le sens (pour l’ensemble des étudiant.e.s), et il serait souhaitable de modifier les transcriptions pour s’assurer de l’exactitude des termes employés. Il pourrait aussi s’avérer utile, dans la mesure du possible, de remettre une copie de votre présentation avant le cours.

Dépenses. Vivre avec un handicap entraîne beaucoup de dépenses, et les subventions gouvernementales et l’aide offerte par les œuvres de bienfaisance ne compensent que partiellement tous ces coûts. Voilà pourquoi bien des étudiant.e.s en situation de handicap doivent travailler à temps partiel pour payer leurs frais de subsistance, réduisant ainsi le temps disponible pour étudier. La plupart des gens peuvent facilement comprendre que l’achat de matériel spécialisé, comme un fauteuil roulant, peut coûter des milliers de dollars, mais vous ignorez sans doute, à titre d’exemple, qu’un chien d’assistance peut coûter autant qu’une petite voiture, selon le dressage reçu. D’autres dépenses moins évidentes peuvent aussi s’imposer, comme celles liées à l’obtention de documents médicaux donnant droit à des mesures d’adaptation ou de notes de médecin nécessaires en cas d’absence à un cours de laboratoire ou d’impossibilité de réaliser un devoir ou une évaluation (comme un examen de milieu ou de fin de trimestre) dans les délais prescrits.  Les médicaments et les traitements ne sont pas toujours entièrement couverts ou remboursés par les polices d’assurance, réduisant ainsi davantage un budget déjà limité. Si une personne a une mobilité réduite, il faut encore ajouter des frais de transport. En outre, les personnes en situation de handicap sont souvent désavantagées quand il leur faut trouver un logement abordable et décent qui répond à leurs besoins tout en étant près du campus. Par conséquent, bien des étudiant.e.s décident d’habiter sur le campus, même si cette option s’avère souvent plus coûteuse que de vivre à l’extérieur du campus.

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Autres éléments à retenir

Durant la préparation de la présente ressource, j’ai eu le privilège de m’entretenir avec des étudiant.e.s de premier cycle et des diplômé.e.s ayant divers handicaps dans le but d’échanger sur les expériences qu’elles avaient vécues dans les laboratoires d’enseignement et de recherche. À la lumière de ces entretiens, j’invite le personnel enseignant à s’inspirer des conseils suivants dans leurs interactions avec les étudiant.e.s.

Des mains jointes en forme de cœur

La divulgation d’un handicap est un choix. Les étudiant.e.s ont droit au respect de leur vie privée, et le personnel enseignant n’a pas le droit de leur poser des questions sur leur santé personnelle.

Ne supposez pas les capacités d’un.e étudiant.e en fonction de votre compréhension de son handicap. La ressource qu’il faut absolument consulter pour déterminer les meilleures façons de soutenir l’apprentissage est la personne concernée.

Les deux énoncés précédents témoignent d’une indéniable réalité : il peut s’avérer difficile d’obtenir des renseignements nécessaires au soutien de l’apprentissage d’un.e étudiant.e en laboratoire tout en respectant le droit au respect de la vie privée de cette personne.. Voilà pourquoi des services de soutien académique, comme les services d’accessibilité aux étudiant.e.s, ont la responsabilité de guider le personnel enseignant à cet égard. Le caractère inhabituel d’un apprentissage « en laboratoire » peut néanmoins exiger une collaboration entre l’étudiant.e, d’une part, et l’enseignant.e, d’autre part, de manière à s’assurer que les mesures d’adaptation sont pertinentes et pratiques.

Dans bien des pays, comme au Canada, vous avez l’obligation juridique d’offrir des mesures d’adaptation.

Sachez que des étudiant.e.s peuvent être en attente d’un diagnostic. Cela s’applique particulièrement aux déficiences cognitives ou aux troubles d’apprentissage découverts chez des étudiant.e.s vivant pour la première fois à l’extérieur d’un foyer familial soutenant.

Souffrir d’un handicap se décline de plusieurs manières et selon les circonstances. Suivant la nature d’un handicap donné, un.e étudiant.e peut se sentir bien un jour, mais être trop malade pour assister au cours le lendemain. Certaines maladies (comme la sclérose en plaques, l’épilepsie et la polyarthrite rhumatoïde) peuvent entraîner une incapacité intermittente. La nature dynamique de ces incapacités comporte ses propres défis, dont les suivants :

Souffrir d’un handicap rend la planification difficile impossible. Si un.e étudiant.e en situation de handicap demande un report de la date de remise d’un devoir, la question raisonnable à poser serait la suivante : « Combien de temps vous faudrait-il? » Parfois, la réponse raisonnable est : « Je l’ignore. »

Souffrir d’un handicap peut s’avérer épuisant. Toutes sortes de facteurs peuvent accentuer la fatigue, dont le temps supplémentaire requis pour étudier, le stress physique et émotionnel propre au handicap en cause ou le travail à temps partiel qu’il faut avoir pour subvenir à ses besoins. Même l’obtention de documents concernant un handicap peut drainer la précieuse énergie dont a besoin un.e apprenant.e pour étudier.

Éviter les évaluations « surprises ». Cet énoncé s’applique particulièrement à ce vieil élément de prédilection en sciences : le test préalable en laboratoire. Les étudiant.e.s souffrant d’un handicap tel qu’un trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH) obtiennent souvent de mauvais résultats lors de courts tests rapides administrés dans un laboratoire rempli de distraction. Les notes obtenues ne sont alors pas représentatives de leur préparation ou de leur compréhension de la matière. Au lieu d’un test préalable en laboratoire, envisagez un test en ligne que les étudiant.e.s pourraient effectuer avant à la maison ou dans un endroit de leur choix.

Les laboratoires scientifiques peuvent être effrayants. Et peut-être même dangereux. Celles et ceux d’entre nous dont la carrière se déroule dans un tel milieu peuvent facilement oublier la nature inusitée ou même effrayante de tels endroits pour les personnes qui commencent. Il y a les produits chimiques potentiellement dangereux entreposés dans des verreries de laboratoire fragiles, des becs Bunsen produisant une flamme nue, des scalpels et des lames de rasoir, du matériel en verre et une multitude de pairs excités et distraits. Les risques de blessures sont nombreux dans un laboratoire d’enseignement typique, et les niveaux normaux d’anxiété peuvent augmenter chez les personnes en situation de handicap, réduisant ainsi leurs mouvements ou leurs perceptions.

fioles et verrerie

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Pratiques exemplaires dans un laboratoire d’enseignement

Éléments importants à retenir

  • Une expérience pratique est inestimable pour recenser les obstacles possibles et les risques pour la sécurité. Les étudiant.e.s ayant un handicap physique peuvent tirer avantage d’une visite du laboratoire d’enseignement avant le premier jour de classe.
  • Supposer le caractère accessible d’un laboratoire d’enseignement simplement parce qu’il est censé l’être est insuffisant pour garantir cette accessibilité.
  • La propreté est une priorité! Seul un laboratoire bien dégagé et organisé permet d’assurer l’accessibilité et la sécurité de l’ensemble des étudiant.e.s.
  • Évitez les tests en laboratoire pour évaluer la préparation ou la compréhension des étudiant.e.s.
  • Il est possible de modifier facilement de nombreuses pièces de matériel de laboratoire pour accroître l’accessibilité.

Vers la réussite

Bien des étudiant.e.s ayant un handicap physique tireront avantage d’une visite de l’immeuble ou des laboratoires d’enseignement avant le premier jour de classe. Il faudrait encourager une telle découverte en offrant des visites guidées des locaux animées par l’enseignant.e, un.e assistant.e d’enseignement ou un.e responsable des laboratoires. Un tel exercice permettra aux étudiant.e.s de se familiariser avec leur milieu d’apprentissage sans distraction et d’évaluer personnellement et concrètement l’accessibilité du local et de l’immeuble. Ainsi, en cas de problème d’accessibilité, le personnel enseignant disposera d’assez de temps pour les résoudre avant le début du cours. Cette activité donnera aussi aux étudiant.e.s la chance de discuter de leurs préoccupations avec les enseignant.e.s en l’absence de leurs pairs et offrira une excellente occasion d’établir une relation positive entre les deux parties.

Tous les handicaps physiques s’inscrivent dans un spectre, et les capacités de travail en laboratoire peuvent varier grandement d’une personne à l’autre. Le fait de simplement supposer qu’un local ou un immeuble est accessible parce qu’il est censé l’être ou qu’il a été désigné comme étant accessible pour les fauteuils roulants, à titre d’exemple, ne permet pas d’en garantir l’accessibilité à toutes et à tous. De telles suppositions comportent un véritable risque, puisqu’un.e étudiant.e ayant un handicap physique pourrait ne pas pouvoir accéder au laboratoire d’enseignement à temps pour le début du cours, situation désavantageuse dès le premier jour qui peut engendrer un stress inutile pour toutes les personnes en cause. Il est tout aussi important de souligner que, dans bien des cas, la conception et l’aménagement d’un laboratoire d’enseignement varient en fonction du cours donné. Voilà pourquoi le fait de permettre aux étudiant.e.s de visiter le laboratoire d’enseignement qui leur est attribué (et non pas seulement un laboratoire voisin semblable) constitue la meilleure façon de favoriser leur réussite.

Partir du bon pied

En règle générale, la pratique exemplaire veut qu’un.e enseignant.e discute d’accessibilité et de sécurité avec sa classe au début de la première activité en laboratoire. Le fait de lancer un tel dialogue fait comprendre aux étudiant.e.s que vous vous souciez de leur sécurité et de leur bien-être et les incite à venir vous faire part de leurs préoccupations. N’oubliez jamais qu’un.e étudiant.e pourrait ne pas souhaiter divulguer un handicap et que vous n’avez pas le droit de poser des questions indiscrètes sur la nature de son handicap ou son état de santé. En outre, un.e étudiant.e pourrait ignorer l’existence d’un handicap (surtout en cas de déficience cognitive ou trouble d’apprentissage) ou ne pas savoir que son handicap peut avoir des conséquences sur son apprentissage dans un milieu si particulier (ce qui est d’autant plus vrai pour une personne ne s’étant jamais trouvée dans un laboratoire). À titre d’exemple, les personnes ayant un trouble de l’intégration sensorielle ou un trouble du spectre de l’autisme pourraient être touchées négativement par les odeurs et sons inhabituels d’un laboratoire d’enseignement, surtout s’ils surviennent de façon inattendue du point de vue de l’étudiant.e. Il en va de même pour les personnes souffrant d’un trouble de stress post-traumatique. Il est donc recommandé à l’enseignant.e d’informer la population étudiante au début du cours en laboratoire qu’une expérience donnée peut engendrer des bruits forts ou des odeurs inhabituelles. Une telle mise en garde est aussi importante lorsque des chiens d’assistance peuvent être exposés à des odeurs ou bruits inhabituels et en subir les effets négatifs. Pour d’autres détails sur la manière d’accueillir les chiens d’assistance en toute sécurité, veuillez consulter la section sur le sujet plus loin dans le présent document.

La propreté est une priorité

Bien des « pratiques exemplaires » communément adoptées pour favoriser la sécurité des étudiant.e.s dans les laboratoires d’enseignement sont essentielles au bien-être des personnes handicapées dans de tels endroits.  Il est très important de retirer des allées tout matériel pouvant gêner les déplacements (comme les sacs à dos, les manteaux ou l’équipement de laboratoire) dans les classes fréquentées par des personnes ayant une vision faible ou un handicap entraînant une mobilité restreinte. Il faudrait de préférence offrir aux étudiant.e.s des casiers à l’extérieur de la classe pour y ranger leurs effets personnels, à l’exception du matériel nécessaire en laboratoire (comme des crayons, des stylos ou des manuels de laboratoire). Cette règle s’accompagne toutefois d’une exception importante pour les étudiant.e.s dont l’état exige un accès immédiat à des médicaments ou à des appareils médicaux, par exemple. En pareil cas, la pratique exemplaire peut consister à permettre à un.e étudiant.e de conserver ses effets personnels dans un petit sac, en lui indiquant toutefois que l’objet ne peut pas être déposé sur le plancher ou une table de laboratoire et qu’il ou elle doit l’avoir en sa possession en tout temps. De la même manière, des personnes aux prises avec un TDAH ou un trouble du spectre de l’autisme, par exemple, peuvent tirer avantage d’un accès à des petits jouets sensoriels pouvant les aider à se concentrer ou à se calmer en laboratoire. Les petits articles comme des toupies de main ou des bagues sensorielles conviennent parfaitement à un laboratoire, puisqu’ils sont souvent portés comme des bijoux. Ils peuvent toutefois s’avérer problématiques s’ils sont portés sur une main qu’il faut recouvrir d’un gant.  Dans bien des cas, il faudrait dissuader l’emploi de bijoux à mordiller, moins couramment utilisés par des adultes, pour éviter qu’ils entre en contact avec des produits chimiques ou des substances biologiques dangereuses.

Éviter la vieille épreuve du test préalable en laboratoire

Quand j’étais étudiante de premier cycle, beaucoup de cours en laboratoire commençaient par un test préalable pour inciter les étudiant.e.s à bien se préparer et évaluer leur compréhension du travail à accomplir. De tels tests sont d’ailleurs encore couramment utilisés dans les cours de laboratoire de nos jours. Toutefois, les courts tests rigoureusement minutés évaluent mal les étudiant.e.s ayant de nombreux troubles d’apprentissage courants, comme un TDAH. Ces personnes ont de la difficulté à obtenir des résultats satisfaisants lors de tests administrés dans des endroits remplis de distractions, et la courte durée de ces tests exclut leur déroulement à un autre endroit, comme on le prévoirait pour un examen formel. Il peut s’avérer tentant d’ignorer ces préoccupations si les tests ne représentent qu’un petit pourcentage de la note finale, mais il ne faut pas oublier que l’obtention d’un résultat insatisfaisant lors d’un test (même si sa pondération est minime) est stressante et décourageante et qu’elle minera sans doute la confiance de l’étudiant.e au tout début de la période de laboratoire. Il existe une solution simple à ce problème, soit celle de faire passer le même test en ligne pour permettre aux étudiant.e.s d’effectuer l’évaluation à un endroit plus calme de leur choix.

Matériel de laboratoire spécialisé et coup de main

Il est possible de modifier aisément de nombreuses pièces de matériel de laboratoire en fonction des différents types de handicaps. On peut, à titre d’exemple :

  1. ajouter de grandes marques à contraste élevé pour aider les personnes éprouvant des difficultés visuelles (p. ex., règles, thermomètres, seringues);
  2. avoir du matériel qui « parle » aux gens (p. ex., calculatrices, balances, thermomètres);
  3. avoir des appareils modifiés de remplissage des pipettes pour les personnes incapables de saisir une pipette ordinaire;
  4. pour les personnes ayant une déficience visuelle, soutenir les activités en laboratoire au moyen de codes de couleurs à l’aide desquels les morceaux de ruban colorés peuvent faciliter l’identification de produits chimiques, par exemple.

Le Disabilities, Opportunities, Internetworking, and Technology (DO-IT) Center est une précieuse ressource où trouver d’autres renseignements sur le matériel de laboratoire spécialisé et les fabricants.

Dans les cas où une personne ne pourrait pas utiliser efficacement ses propres mains, on pourrait recourir aux services d’un.e assistant.e d’enseignement pouvant faire des manipulations en fonction des instructions de l’étudiant.e. Un tel partenariat pourrait aussi aider les étudiant.e.s ayant une déficience visuelle. Il peut sembler facile de former une équipe composée d’un.e étudiant.e en situation de handicap et d’une autre personne physiquement apte, mais il ne faut pas oublier qu’une telle association peut engendrer du stress chez les deux personnes : la première pourrait avoir l’impression de freiner ou de déranger la seconde, alors que le ou la partenaire « aidant.e » pourrait se sentir obligé.e de faire plus que sa part.

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Mesures d’adaptation pour les chiens d’assistance dans un laboratoire d’enseignement

Avatar de Dominique et de Westley, son chien d’assistance

Par Dominique Daniels

Introduction

Certain.e.s étudiant.e.s en situation de handicap ont besoin d’un chien d’assistance pour accomplir leurs tâches quotidiennes, ce qui comprend leurs travaux scolaires et de laboratoire.  Un chien d’assistance est un chien dressé pour aider une personne handicapée ou lui servir de guide (Loi de 2016 sur les chiens dassistance en Ontario). Pour obtenir une certification, les chiens d’assistance doivent recevoir un entraînement rigoureux leur permettant d’accomplir leurs tâches de chiens d’assistance et d’adopter un comportement adéquat dans des lieux publics. Il existe de nombreux types de chiens d’assistance, comme les chiens-guides pour les aveugles, les chiens d’assistance à la mobilité, les chiens d’alerte pour les diabétiques et les chiens d’alerte et d’intervention pour les épileptiques. Les chiens d’assistance sont identifiés à l’aide d’une veste ou d’un harnais que porte l’animal ou de documents médicaux en possession de son maître (Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de lOntario). En Ontario, il faut traiter les chiens d’assistance de la même façon que toute autre aide à l’accessibilité et ils doivent avoir accès aux endroits publics et aux installations scolaires (Loi de 2016 sur les chiens dassistance en Ontario).

Règles à suivre en présence de chiens d’assistance

Les chiens d’assistance font un travail important. Il faut donc leur accorder l’espace requis pour se concentrer sur leurs tâches. Dans un laboratoire, cette concentration est encore plus importante, puisque toute distraction d’un chien d’assistance peut avoir de graves conséquences pour la sécurité de l’étudiant.e et de son animal.

Les comportements suivants sont très dérangeants pour un chien d’assistance; il faudrait donc les éviter, à moins d’avoir reçu une permission spécifique du maître de l’animal :

  • caresser ou toucher le chien d’assistance;
  • parler au chien d’assistance;
  • siffler, agiter la main ou appeler le chien d’assistance pour attirer son attention;
  • nourrir le chien d’assistance.

Quand vous parlez à une personne ayant un chien d’assistance, n’oubliez pas de toujours vous adresser à celle-ci, et non à l’animal. Respectez les renseignements médicaux personnels d’un.e étudiant.e. Ne posez des questions sur la fonction que remplit le chien d’assistance que si les réponses sont nécessaires à la sécurité ou à l’accessibilité. Pour protéger la vie privée et la sécurité de l’étudiant.e, ne publiez aucune photo ou vidéo d’un chien d’assistance sur les médias sociaux sans obtenir le consentement préalable spécifique de l’étudiant.e.

Sécurité

Les pratiques en matière de santé et de sécurité dans les laboratoires d’apprentissage constituent un élément fondamental des cours de premier cycle en laboratoire. Les cours de laboratoire offrent une excellente occasion aux étudiant.e.s ayant un chien d’assistance d’apprendre les mesures de sécurité pertinentes en laboratoire pour leur animal avant d’y effectuer des travaux de recherche. Les décisions relatives à la sécurité devraient être prises en collaboration avec l’étudiant.e, puisque chaque équipe comprenant un chien d’assistance possède ses propres besoins et préoccupations en matière de sécurité selon la nature des tâches de l’animal. Cependant, tout chien d’assistance doit porter de l’équipement de protection individuelle (EPI) approprié et avoir un endroit sûr où s’asseoir ou se coucher durant les séances en laboratoire.

Équipement de protection individuelle (EPI)

Les chiens d’assistance doivent se protéger contre les mêmes risques que les êtres humains et, conséquemment, porter le même type d’EPI que les humains. Selon les activités et les risques en laboratoire, les chiens d’assistance devraient porter un sarrau de laboratoire, des lunettes et des bottes.  Il faudrait éloigner le chien de toute activité durant laquelle des substances risquent fortement d’être renversées ainsi que prévoir un tapis non absorbant sur lequel l’animal pourrait s’asseoir afin d’empêcher les substances renversées d’atteindre l’endroit où il se trouve. Il faut se rappeler que de nombreuses races de chiens peuvent devenir des chiens d’assistances et que les recommandations ci-dessous pourraient ne pas convenir à tous les chiens. Il faudrait donc consulter l’étudiant.e avant d’acheter tout EPI pour s’assurer qu’il convient au chien d’assistance.

Équipement de protection individuelle (EPI) pour chien d’assistance

Les chiens d’assistance peuvent porter les mêmes sarraus de laboratoire que les êtres humains. Il est possible d’en acheter un à la Boutique Campus ou au Magasin des sciences pour 30 $ CA environ. Pour offrir le plus grand confort et éviter de limiter les mouvements, il faut choisir la taille du sarrau de laboratoire en fonction de la largeur des épaules du chien. Pour aider le chien à enfiler le sarrau de laboratoire, il faut entrer ses pattes avant dans les manches, et l’arrière du vêtement doit recouvrir le dos de l’animal. Le tissu excédentaire peut être rentré sous le bas de la veste du chien d’assistance pour éviter qu’il traîne derrière l’animal ou qu’il le fasse trébucher. Il est à noter qu’il n’existe actuellement aucun sarrau de laboratoire conçu spécialement pour les chiens. Les « sarraus de laboratoire pour chien » vendus en ligne sont des costumes et non des vêtements de protection. Il faut acheter un sarrau de laboratoire auprès d’un véritable fournisseur d’EPI.

Il peut s’avérer difficile de trouver une protection oculaire adéquate pour les chiens. Les lunettes Rex Specs sont l’option la plus courante pour les chiens de travail. Elles possèdent un joint étanche qui épouse le contour des yeux afin de le protéger des éclaboussures. Le verre de polycarbonate résiste aux chocs et respecte la norme ANSI Z87.1-2010 sur les tests de résistance aux impacts. Il est possible d’acheter le modèle conçu pour les chiens de travail sur le site Web rexspecs.com pour 80 $ US environ.

Il existe de nombreuses options pour protéger les pattes des chiens d’assistance. Les bottillons Pawz sont une option facile à se procurer. Ils sont offerts dans de nombreuses grandeurs et vendus dans la plupart des animaleries. Ils coûtent environ 20 $ CA par paquet de 12 bottillons. Ces bottillons sont jetables, mais ils peuvent être portés de nombreuses fois avant de devenir inutilisables. Ils sont vendus en paquets de 12 parce qu’ils ne durent pas très longtemps. Ils sont toutefois avantageux pour le travail en laboratoire puisqu’il est possible de les jeter s’ils entrent en contact avec des substances renversées. Certains chiens trouvent inconfortable la texture caoutchoutée des bottillons, mais il est possible de leur enfiler des chaussettes pour bébés avant, pour plus de confort. Il existe aussi des bottillons en tissu réutilisables pour les chiens, mais ils peuvent s’avérer trop chauds pour un usage à l’intérieur et coûteux s’il faut les jeter après être entrés en contact avec une substance renversée.

Si de grandes quantités de substances risquent d’être renversées en laboratoire, il faudrait utiliser un tapis non absorbant pour permettre au chien de s’y asseoir ou de s’y coucher en toute sécurité. Beaucoup de tapis non absorbants sont offerts dans les animaleries, et il est possible de les tailler en fonction de la taille du chien et de l’espace à couvrir. Le tapis de cage coussiné de l’entreprise MidWest constitue une autre option. Il est vendu dans la plupart des animaleries pour 50 $ CA environ. Il résiste à l’eau et il est facile de le nettoyer et de le désinfecter.

Autres considérations en matière de sécurité

Les chiens d’assistance ont besoin d’un endroit sûr où s’asseoir et se reposer pendant que l’étudiant.e effectue des expériences. L’endroit assigné aux étudiant.e.s ayant un chien d’assistance doit se trouver près d’un endroit sûr où l’animal ne risque pas de faire trébucher des gens ou de se faire marcher dessus. Il peut s’agir d’une table près d’un mur extérieur du local ou d’un espace à proximité d’une inutilisée. Certains locaux ont des espaces sous les tables de laboratoire où les chiens peuvent s’installer, si leur taille le leur permet. Les besoins de chaque équipe comprenant un chien d’assistance sont uniques, et il faudrait toujours consulter l’étudiant.e au moment de choisir la table la plus sûre.

L’odorat des chiens est beaucoup plus développé que celui des êtres humains, une caractéristique qui leur permet souvent d’accomplir diverses tâches, comme la détection des crises d’épilepsie. Les chiens d’assistance peuvent donc être plus sensibles aux odeurs fortes en laboratoire. En présence de chiens d’assistance, il faut redoubler de prudence et mener les expériences produisant de fortes odeurs sous une hotte et loin de ces animaux. Les chiens d’assistance peuvent aussi être plus sensibles aux bruits que les êtres humains. Pour protéger l’audition des chiens d’assistance, il faudrait les éloigner du matériel très bruyant (p. ex., générateur d’ultrasons). En présence de bruits modérément forts, un.e étudiant.e peut utiliser des tampons d’ouate pour boucher les oreilles de son chien d’assistance.

7

Mesures d’adaptation pour les étudiant.e.s ayant une déficience visuelle

Par Océanne Comtois

Éléments importants à retenir

  • Les étudiant.e.s ayant une déficience visuelle souhaitent vivement participer aux activités de laboratoire.
  • Le laboratoire est un milieu si particulier qu’il faut prévoir des mesures d’adaptation spéciales, et la souplesse est extrêmement importante.
  • Lors des discussions sur les mesures d’adaptation d’un.e étudiant.e, les enseignant.e.s devraient préparer une liste des activités requises dans le cadre du cours pour orienter les échanges.
  • Le personnel enseignant devrait permettre aux étudiant.e.s ayant une déficience visuelle de former des groupes de trois personnes au lieu des traditionnelles équipes de deux personnes.
  • Vous pouvez aussi permettre aux étudiant.e.s ayant une déficience visuelle de s’adjoindre un.e assistant.e en laboratoire pour les aider à accomplir des tâches impossibles à réaliser par elles-mêmes ou eux-mêmes.

Contexte

Les considérations qui suivent ont été élaborées après avoir consulté trois autres personnes ayant une déficience visuelle, moi y compris. Ces personnes sont inscrites actuellement à des programmes de sciences biologiques dans différents établissements d’enseignement ou ont terminé leurs études dans ces programmes. Lors de rencontres individuelles, on a demandé aux étudiant.e.s de répondre aux questions suivantes. Leurs réponses ont été résumées ci-dessous.

« Que souhaitez-vous que votre enseignant.e sache avant de commencer? »

Les étudiant.e.s ayant une déficience visuelle souhaitent vivement participer aux activités de laboratoire, mais doivent savoir comment y prendre part et pouvoir contourner certaines limitations. Veuillez garder à l’esprit que les étudiant.e.s ayant une déficience visuelle peuvent ressentir autant de frustration et d’anxiété que vous (enseignant.e ou assistant.e d’enseignement) au sujet du travail dans un laboratoire de cours. Malheureusement, il existe très peu de ressources pour guider les personnes ayant une déficience visuelle à l’intérieur d’un laboratoire.  La liste des mesures d’adaptation approuvées devrait aussi s’appliquer aux cours en laboratoire, mais un laboratoire est un endroit si particulier qu’il faut des mesures d’adaptation distinctes en plus de celles nécessaires en classe ordinaire ou en salle de conférence. Il est cependant difficile de déterminer à l’avance ce qui s’avérera nécessaire pour apprendre de nouvelles techniques. La souplesse est extrêmement importante.

L’attitude de l’enseignant.e envers l’étudiant.e et son handicap aura une incidence sur l’attitude de cette dernière ou de ce dernier. Elle déterminera si l’étudiant.e se sentira à l’aise de discuter des mesures d’adaptation avec son enseignant.e. Un milieu accueillant aide beaucoup. Il faut toujours avoir à l’esprit que les étudiant.e.s ayant une déficience visuelle connaissent leurs limitations et veulent se sentir encouragé.e.s et accueilli.e.s en laboratoire.

« Que peuvent faire les enseignant.e.s donnant des cours en laboratoire pour aider les étudiant.e.s à progresser? »

  • Si un.e étudiant.e vous présente une lettre concernant ses mesures d’adaptation ou vous dévoile son handicap, répondez-lui et proposez-lui d’examiner les manières de lui offrir des mesures d’adaptation en laboratoire.
  • Lors des discussions sur les mesures d’adaptation d’un.e étudiant.e, les enseignant.e.s devraient préparer une liste des activités requises dans le cadre du cours. Cette liste devrait comprendre les compétences techniques nécessaires, le matériel à utiliser et le mode d’évaluation.
  • L’enseignant.e devrait faire preuve d’une grande ouverture et souplesse en ce qui a trait aux devoirs et aux clés de correction. Si un.e étudiant.e approche un.e enseignant.e pour lui faire part de ses limitations, il faut en tenir compte lors de l’évaluation et de la notation des travaux et examens.
  • L’enseignant.e doit comprendre que chaque étudiant.e possède ses propres mesures d’adaptation et qu’une solution efficace pour une personne peut s’avérer inefficace pour une autre.
  • Le personnel enseignant pourrait permettre aux étudiant.e.s ayant une déficience visuelle de former des groupes de trois personnes au lieu des traditionnelles équipes de deux personnes. Une telle mesure pourrait réduire la pression ressentie par l’étudiant.e et lui permettre de contribuer au travail tout en laissant ses partenaires accomplir les tâches pour lesquelles elle ou il se sent moins à l’aise.
  • Les enseignant.e.s peuvent publier leur matériel pédagogique ou l’envoyer directement à l’étudiant.e en avance.
  • Les enseignant.e.s peuvent s’assurer de distribuer une version accessible de leurs documents sur demande.
  • Pour une démonstration, il faut permettre aux étudiant.e.s ayant une déficience visuelle de s’approcher, les informer de la démonstration après la présentation au groupe ou leur donner une série d’instructions écrites claires.
  • Les enseignant.e.s ne doivent pas dévoiler à un groupe la déficience visuelle d’un.e étudiant.e, et devraient éviter de prendre à partie l’étudiant.e publiquement.

« Que peut faire l’administration de la faculté ou que devrait promouvoir le corps enseignant auprès de l’administration pour mieux soutenir les étudiant.e.s en situation de handicap en laboratoire? »

  • Créer un programme de formation pour les assistant.e.s d’enseignement (qui ont probablement les relations les plus étroites avec les étudiant.e.s en laboratoire) pour les aider à mieux comprendre comment aider les personnes en situation de handicap et interagir avec elles.
  • Permettre aux étudiant.e.s de s’adjoindre un.e assistant.e en laboratoire pour les aider à accomplir des tâches impossibles à réaliser par elles-mêmes ou eux-mêmes. Cette personne peut suivre les consignes que lui donne l’étudiant.e et posséderait une expérience en laboratoire lui permettant d’accomplir des tâches en fonction des instructions énoncées par l’étudiant.e ayant une déficience visuelle.
  • Mettre en œuvre des principes de conception universelle lors de la création ou de la modernisation de laboratoires. La conception universelle profite à tout le monde.
  • Inclure ou mettre à jour un énoncé d’accessibilité dans le plan de cours pour inciter les étudiant.e.s à communiquer avec le bureau de services aux personnes en situation de handicap et les encourager à présenter leurs mesures d’adaptation à leurs enseignant.e.s.
  • Trouver des moyens d’encourager et d’inciter les étudiant.e.s handicapé.e.s à profiter des occasions de recherche extracurriculaires.

II

Témoignages d’étudiantes

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Présentation des témoignages d’étudiantes

étudiantes se promenant sur le campus; l’une d’entre elles possède une aide à la mobilité

Dans la section qui suit, nous vous invitons à lire les témoignages d’étudiantes de premier cycle inscrites à la Faculté des sciences de l’Université d’Ottawa. Ces témoignages nous éclairent sur les défis que doivent relever les jeunes durant leurs études et font ressortir les manières dont les enseignant.e.s peuvent les aider à atteindre leurs objectifs universitaires.

Ces témoignages sont rédigés par les étudiantes elles-mêmes, et ces dernières ont toutes accepté de dévoiler leur nom dans le cadre de la présente publication.

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Travail dans un laboratoire d’enseignement pour un.e étudiant.e ayant une déficience visuelle

Avatar de l’autrice, Océanne Comtois

Par Océanne Comtois
Je crois fermement que les scientifiques ne se définissent pas par leurs capacités, mais par leur passion pour la science et la recherche.En laboratoire, souffrir d’une déficience visuelle peut parfois rendre les choses très difficiles. Il existe de nombreux types de déficiences visuelles, mais la mienne a des conséquences sur ma perception de la profondeur et ma capacité à voir des objets éloignés ou petits. En outre, mes yeux ont beaucoup de difficulté à se concentrer sur l’objet de mon regard, ce qui me cause de la fatigue oculaire et réduit mes aptitudes de coordination. Il peut m’être difficile d’observer des démonstrations, de travailler avec de petites concentrations – activité qui exige de la précision – et de remarquer des détails mineurs; tout cela peut malheureusement me faire vivre des expériences négatives en laboratoire et avoir des répercussions sur mon rendement scolaire dans le cadre du cours en question.  J’avais toujours hâte de mettre à l’épreuve de nouvelles techniques ou compétences, mais j’ai souvent eu l’impression que ma vision limitait ma progression et celle de mes collègues de classe. La seule idée de m’inscrire à des cours en laboratoire accentuait ma nervosité et mon inconfort.

J’avais toujours hâte de mettre à l’épreuve de nouvelles techniques ou compétences, mais j’ai souvent eu l’impression que ma vision limitait ma progression et celle de mes collègues de classe. La seule idée de m’inscrire à des cours en laboratoire accentuait ma nervosité et mon inconfort.En plus des obstacles physiques, les cours de laboratoire m’imposaient d’autres barrières sociales difficiles à surmonter. J’ai vécu des situations difficiles avec des enseignant.e.s et assistant.e.s d’enseignement. En effet, on m’a déjà volontairement exclue d’activités, on a dévoilé publiquement à mes collègues de classe des renseignements personnels sur mon handicap et on a tenu des propos blessants ou offensants à mon égard ou supposé à tort mes capacités. Ces situations problématiques ont été correctement résolues, mais elles ont sans doute eu de profonds effets sur moi , accentuant ainsi mes craintes à l’idée de m’inscrire à d’autres cours de laboratoire et de poursuivre mes études et une carrière dans le domaine des sciences.

Malgré ces quelques expériences, j’ai vécu une expérience somme toute positive avec mes enseignant.e.s, qui se sont d’ailleurs toujours empressé.e.s de m’offrir des mesures d’adaptation et de bien m’accueillir dans leur classe. « En ayant des échanges francs et honnêtes, nous avons pu trouver différents moyens pour évaluer mon rendement pour les composantes pratiques du cours en laboratoire. »En ayant des échanges francs et honnêtes, nous avons pu trouver différents moyens pour évaluer mon rendement pour les composantes pratiques du cours en laboratoire, comme établir des critères d’évaluation différents mais semblables tenant compte de mes limitations, recevoir l’aide d’une autre personne en laboratoire qui effectuait des manipulations en fonction de mes consignes orales, s’assurer que toutes les consignes étaient données avant le cours et que les démonstrations étaient écrites et suffisamment détaillées, m’autoriser à visiter le laboratoire et à découvrir mon environnement au début du trimestre, et communiquer clairement les objectifs du cours de manière à ce que je puisse résoudre tout problème pouvant survenir durant le trimestre.

Je crois fermement que les scientifiques ne se définissent pas par leurs capacités, mais par leur passion pour la science et la recherche. Voilà pourquoi je pense qu’il faut parvenir à rendre la science inclusive pour les personnes en situation de handicap, et ce, non seulement en mettant en œuvre des mesures d’adaptation en classe, mais aussi en redéfinissant notre perception des situations de handicap.

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Travail dans un laboratoire d’enseignement pour une personne souffrant d’épilepsie

« L’élaboration de lignes directrices sur l’accessibilité et la prise en compte des expériences des étudiant.e.s en situation de handicap peuvent améliorer grandement les expériences vécues durant les cours de laboratoire. »

Par Dominique Daniels

Tout au long de mes études de premier cycle, les cours de laboratoire étaient de loin mes activités préférées, puisque j’étais toujours emballée de pouvoir apprendre et mettre à l’essai de nouvelles compétences de laboratoire. Ces cours de laboratoire s’accompagnaient toutefois aussi de nombreux défis découlant de mon handicap. Tous mes collègues de classe et la majeure partie du personnel enseignant et des auxiliaires m’ont soutenue et souhaitaient mettre en place les mesures d’adaptation nécessaires. Les premières années de mon programme se sont toutefois avérées très difficiles parce que la Faculté des sciences n’était pas prête à accueillir une étudiante avec un chien d’assistance et qu’elle ne disposait pas du matériel requis pour une telle situation. Ce manque de préparation s’est traduit par un manque de lignes directrices concernant la protection de mon chien d’assistance en laboratoire, m’obligeant ainsi à prévoir les procédures de sécurité et à choisir l’EPI de mon chien par moi-même. Cette tâche s’est avérée très complexe pour une étudiante de première année qui n’avait jamais mis les pieds dans un laboratoire.

Les personnes intriguées par le caractère inusité de ma situation s’intéressaient à mon chien d’assistance plutôt qu’à moi. Elles interagissaient avec lui de façon dérangeante. Elles allaient même jusqu’à le prendre en photo sans ma permission.
Le manque de préparation a également eu des conséquences sur la manière dont j’ai été traitée par plusieurs membres de la faculté. Il semblait qu’un grand nombre de personnes au sein de la faculté considéraient une étudiante avec un chien d’assistance soit comme un désagrément, soit comme une curiosité. Celles qui me voyaient comme un désagrément ont énoncé clairement qu’elles n’étaient pas d’accord avec la présence d’un chien d’assistance en laboratoire. Une personne occupant un poste de direction au sein de la faculté m’a même dit que la tâche était plus simple pour l’organisation lorsque j’étais en période d’enseignement coopératif parce que je n’étais pas présente en laboratoire. Ces commentaires étaient décourageants. J’ai alors commencé à penser qu’il n’y avait pas de place pour moi dans le domaine des sciences et à douter de ma capacité à poursuivre une carrière en recherche. Les personnes intriguées par le caractère inusité de ma situation s’intéressaient à mon chien d’assistance plutôt qu’à moi. Elles interagissaient avec lui de façon dérangeante. Elles allaient même jusqu’à le prendre en photo sans ma permission. Une fois, un assistant d’enseignement a pris une photographie de mon chien d’assistance portant son EPI et l’a publiée sur Reddit sans ma permission et à mon insu. Cette publication est devenue très populaire, et j’ai alors reçu des menaces de mort et des messages me disant « d’abandonner les sciences ». Aujourd’hui, je considère cet incident comme une tentative maladroite ayant pour but de publier une photographie d’un chien avec un EPI. À l’époque, toutefois, j’étais terrifiée et attristée de la manière dont les gens considéraient les étudiant.e.s en situation de handicap.

En sensibilisant le personnel et en lui offrant de la formation sur le sujet, il sera possible d’éviter beaucoup de ces expériences pour les étudiant.e.s en situation de handicap qui s’inscriront à de tels cours ultérieurement. L’élaboration de lignes directrices sur l’accessibilité et la prise en compte des expériences des étudiant.e.s en situation de handicap peuvent améliorer grandement les expériences vécues durant les cours de laboratoire. Je suis ravie de voir les efforts que déploie la Faculté des sciences en matière d’accessibilité et j’espère que la prochaine cohorte d’étudiant.e.s en situation de handicap n’aura pas à vivre ce que j’ai vécu durant mes études de premier cycle.

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Travail dans un laboratoire d’enseignement pour une personne à mobilité réduite

Avatar de l’autrice, Victoria Ogden

Par Victoria Ogden

Avoir le choix change la donne.Même les solutions universelles comportent presque toutes des désavantages.J’ai commencé à fréquenter l’université il y a quelques années. Je me rappelle la grande transition que j’ai vécue entre l’école secondaire, où mes enseignant.e.s se souciaient activement de mes apprentissages, et ce nouveau milieu où je devais me débrouiller seule. En tant que jeune adulte, j’appréciais cette liberté, mais, au fil du temps, je comprenais que cette absence de soutien avait des conséquences négatives sur mes apprentissages. Ce n’est qu’à la fin de ma troisième année que j’ai reçu un diagnostic : problèmes de mobilité réduite et douleurs chroniques. En définitive, j’ai trouvé de l’aide au bureau des services aux personnes handicapées, où l’on m’a aidé à trouver des mesures d’adaptation me convenant, mais j’ai dû continuer de relever des défis en tant qu’étudiante handicapée en chimie.

Il y a eu des moments où j’avais l’impression que le domaine des sciences n’était pas pour les personnes comme moi en raison de propos tenus directement par des enseignant.e.s. ou des efforts déployés indirectement pour éviter de m’accorder des mesures d’adaptation. Je tente de me concentrer sur les conseils des enseignant.e.s qui veulent plutôt offrir le meilleur pour tout le monde. Les attitudes adoptées peuvent varier grandement. J’espère que l’on continuera d’accorder de plus en plus d’importance à l’enseignement et à la recherche dans les décisions relatives aux nominations. L’attitude affichée s’imprègne dans l’expérience vécue par les étudiant.e.s en situation de handicap.

J’ai vécu l’une de mes expériences les plus difficiles lorsque j’ai manqué un laboratoire de chimie organique au début du trimestre. Le coordonnateur des laboratoires n’a pu planifier aucun cours de reprise en laboratoire et il a refusé de réduire une partie du contenu. Il m’a alors dit de travailler deux fois plus fort lors du prochain cours de laboratoire. Le laboratoire a duré six heures, et je n’ai jamais arrêté de travailler pour manger, boire de l’eau ou prendre une simple pause. Cette expérience s’est avérée extrêmement stressante et elle a aggravé la maladie. En définitive, je regrette de ne pas avoir protesté en exposant davantage mon état de santé. Je n’ai pas eu d’autre choix que d’abandonner le cours de laboratoire.

En revanche, j’ai beaucoup aimé les enseignant.e.s qui ont redoublé d’efforts et élaboré différentes solutions avec mon aide quand j’étais malade et que je manquais un examen de milieu de trimestre ou un devoir. Parfois, ces ajustements demandent des devoirs de reprise, une modification des pondérations ou des évaluations sous une forme différente (mais équivalente). Avoir le choix change la donne. Même les solutions universelles comportent presque toutes des désavantages.

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Travail dans un laboratoire d’enseignement pour une personne ayant un trouble d’apprentissage

Avatar de l’autrice, Allison O’Rourke

Par Allison O’Rourke

J’ai reçu le diagnostic relatif à mes troubles d’apprentissage plus tard que bien d’autres personnes. En effet, j’avais 19 ans et j’étais au beau milieu de ma première année à l’université. Quand j’étais plus jeune, j’éprouvais beaucoup de difficultés avec des matières comme les mathématiques et la lecture. Étant donné que personne ne parlait véritablement des différentes manières dont l’apprentissage et les déficiences développementales se présentent selon les genres, on m’a seulement dit de travailler plus fort. Tout au long de mes études supérieures, j’ai simplement surcompensé mes incapacités pour réussir. Cette stratégie s’accompagne d’un problème évident : à mon arrivée à l’université, j’étais non seulement épuisée à cause de tous les efforts déployés pour me concentrer et rivaliser avec mes collègues sur le plan académique, mais aussi frustrée de devoir travailler trois ou quatre fois plus que mes ami.e.s sans pour autant obtenir des résultats satisfaisants.

Cela dit, je reconnais que mon TDAH me donne des capacités utiles dans certaines circonstances. Je suis une spécialiste des tâches multiples. Le travail en laboratoire est une seconde nature, puisqu’il faut surveiller simultanément cinq parties différentes d’une même expérience, ce que je peux faire très facilement tout en conversant avec mes collègues autour de moi. Toutefois, si je dois effectuer un test avant ou pendant le laboratoire, la situation bascule.

Je me rappelle que j’ai échoué à tous mes tests préalables aux cours de laboratoire durant ma première année d’études, non seulement parce que les questions s’affichaient trop rapidement à l’écran devant nous, mais aussi parce que nous devions convertir rapidement des unités sans calculatrice. Comme vous pouvez vous en douter, cette méthode ne me convenait vraiment pas. Mon assistant d’enseignement est venu me voir et m’a dit : « Pourquoi as-tu toujours la mauvaise réponse? J’ai pourtant expliqué comment effectuer les conversions tout juste avant le test. » À ce moment, je n’ai pas pu expliquer pourquoi je me rappelais à peine le nombre de zéro dans un millier et encore moins le nombre de nanomètres dans un centimètre afin de tenter de justifier mon échec. Le même scénario s’est produit pour les autres tests de laboratoire fait sur place et me demandant des détails précis sur une procédure de laboratoire, comme le nombre de millilitres de cyanure à verser dans un mélange réactif, parce que je suis incapable de mémoriser de telles choses. Je me suis toutefois présentée à chaque cours en laboratoire en étant en mesure d’expliquer l’ensemble de la procédure et les raisons pour lesquelles nous devions suivre chaque étape comme nous le faisions, et je prouve tout cela en obtenant des résultats et en étant la première à franchir la porte à la fin de l’exercice.

Quand on laisse les étudiant.e.s ayant des mesures d’adaptation y recourir à chaque évaluation, on leur permet de produire un rendement semblable à celui de leurs pairs.Durant mon passage à l’université, j’ai commencé à croire que les tests préalables en laboratoire ne reflétaient pas fidèlement les connaissances des étudiant.e.s ni leur compréhension des procédures de laboratoire et de la matière du cours. Tout au long de la pandémie, tant le corps enseignant que la population étudiante a démontré que nous possédions une capacité d’adaptation extraordinaire et que nous pouvions utiliser Internet et des plateformes virtuelles pour évaluer les étudiant.e.s. Nous devrions maintenant envisager d’appliquer ces principes en classe. Quand on laisse les étudiant.e.s ayant des mesures d’adaptation y recourir à chaque évaluation, on leur permet de produire un rendement semblable à celui de leurs pairs, et ce, sans les stigmatiser implicitement ou involontairement dès qu’est franchie la porte du laboratoire.

« Le seul fait d’offrir les mêmes outils et la même formation à toutes et à tous ne signifie pas nécessairement que chacun.e pourra utiliser ces outils avec le même niveau de compétence. »

L’autre situation que j’aimerais mettre brièvement en évidence est celle des enseignant.e.s qui révisent les évaluations en groupe au lieu de le faire dans le cadre de rencontres individuelles avec les étudiant.e.s. La logique qui prévaut ici est que chaque personne a ainsi l’occasion d’entendre les propos de l’enseignant.e et que, par conséquent, personne n’est avantagé injustement. À première vue, je comprends le raisonnement sous-jacent d’une telle méthode; en pratique, toutefois, elle repose davantage sur l’égalité que l’équité. Le seul fait d’offrir les mêmes outils et la même formation à toutes et à tous ne signifie pas nécessairement que chacun.e pourra utiliser ces outils avec le même niveau de compétence.

Pour ma part, j’ai découvert que les interactions individuelles avec mes enseignant.e.s étaient bien plus enrichissantes que les discussions en groupe, puisque j’avais plus de latitude pour exprimer mes besoins ou la manière dont on devait m’expliquer certains concepts pour favoriser ma réussite. De cette manière, je ne ressens pas de culpabilité ou je n’ai pas l’impression que mes besoins en tant qu’étudiantes font perdre du temps devant être consacré aux expériences d’apprentissages de mes pairs. Même si j’affirme n’avoir aucun problème à prendre part à la correction d’un devoir en groupe en prenant la peine de toujours mettre en garde les gens que je suis handicapée et qu’il ne faut pas me juger, de telles interventions s’accompagnent toujours malheureusement de culpabilité et de honte. En outre, l’inclusion de mon travail personnel dans les discussions de groupe risque aussi d’instaurer un climat peu accueillant ou hostile entre mes pairs, mon enseignant.e et moi-même.

En acceptant de discuter avec les étudiant.e.s disposé.e.s à échanger en toute franchise sur l’accessibilité dans leurs classes, on leur permet de faire valoir leurs propres arguments sans les mettre à l’écart.
Quelle est donc la solution? Que pouvons-nous concrètement faire pour transformer l’université en un milieu plus accueillant et équitable pour les étudiant.e.s neurodivergent.e.s? Tout commence par l’écoute. En acceptant de discuter avec les étudiant.e.s disposé.e.s à échanger en toute franchise sur l’accessibilité dans leurs classes, on leur permet de faire valoir leurs propres arguments sans les mettre à l’écart. Comme je l’ai mentionné, la culpabilité et la honte découlant d’un handicap empêchent un grand nombre d’entre nous, moi y compris à bien des occasions, d’atteindre des niveaux de potentiel supérieurs. En prenant part à ces conversations dans le respect des expériences de chacun.e en tant qu’enseignant.e.s et qu’étudiant.e.s neurodivergent.e.s, nous pourrons non seulement favoriser l’instauration d’un milieu d’apprentissage où ces étudiant.e.s pourront rivaliser équitablement avec leurs pairs, mais ils et elles pourront le faire librement.

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Travail dans un laboratoire d’enseignement pour une personne atteinte d’autisme

Avatar de l’autrice, Sophie Tomlin

Par Sophie Tomlin

« L’une des choses les plus importantes que vous pouvez faire pour des étudiant.e.s est de vouloir apprendre et collaborer. L’école et l’apprentissage tiennent souvent compte d’une seule façon d’acquérir des connaissances; un petit effort supplémentaire permet donc une plus grande progression. »

Durant mes années d’études, j’ai eu la chance d’avoir des enseignant.e.s extraordinaires qui ont fait preuve d’une grande compréhension.  Je me suis relativement bien débrouillée à l’école, puisque l’environnement se prête à la mise en place de beaucoup de structure, ce qui est essentiel à mon bien-être. En tant que personne devant composer avec une ouïe très sensible, parce qu’il m’est extrêmement difficile de filtrer l’information provenant de mes sens, les tests peuvent être ardus. Comme je ne correspondais pas à l’image typique d’une personne autiste et que je n’éprouvais pas de difficultés à l’école, je n’ai rien su de ma situation avant d’avoir 20 ans. J’ai cependant éprouvé des problèmes plus évidents au tout début. J’avais des flashbacks, mon état était aggravé par les bruits intenses, et j’avais des niveaux fluctuants d’énergie. Les changements apportés à ma routine habituelle, comme les congés et les jours de neige, me perturbaient grandement.

La patience était sans doute la chose pour laquelle j’étais le plus reconnaissante. Pendant longtemps, j’ignorais ce qui me causait tant de chagrin – une maladie mentale, un traumatisme antérieur, une neurodivergence ou une combinaison de ces trois éléments. J’ai toujours été très franche avec mes enseignant.e.s à propos des choses avec lesquelles je devais composer parce que je pensais qu’une telle ouverture les aiderait à mieux me soutenir. J’avais la même philosophie avec les médecins. Même si personne ne savait comment m’aider avec la cause fondamentale du problème, cette ouverture permettait de comprendre le pourquoi et le comment de mes difficultés et de collaborer pour trouver une solution. Cette franchise m’a aussi aidé à demander des choses dont je pouvais avoir besoin, comme du temps supplémentaire ou une salle calme. J’ai pu établir des relations avec mes enseignant.e.s, même si elles étaient simplement axées sur la familiarité. J’ai aussi eu moins de difficulté à demander des mesures d’adaptation à mes enseignant.e.s, parce que j’ignorais toujours la quantité de détails à donner; il était donc plus aisé de presque tous les transmettre.

À l’école secondaire, j’ai eu une enseignante qui, au début de l’année, a distribué aux élèves de mon groupe des feuillets autoadhésifs en demandant d’y écrire trois choses que nous aimerions qu’elle sache à notre sujet. Il pouvait s’agir du fait que nous travaillions à temps partiel, que nous avions des troubles d’attention ou de toute autre chose pouvant l’aider et qu’elle devrait savoir. Si des éléments la préoccupaient ou si elle voulait obtenir des clarifications, elle nous demandait de venir lui parler durant l’heure du repas ou le cours. Elle a fini par devenir une des personnes m’offrant le plus grand des soutiens. Cela ne signifie pas que vous devez tout savoir sur la vie de vos étudiant.e.s, mais seulement que la connaissance des choses et la compassion peuvent s’avérer très utiles et aidantes. J’ai aussi eu un enseignant qui a demandé à ses étudiant.e.s de répondre à un sondage de façon anonyme (à l’exception du numéro de matricule) et d’y indiquer, le plus honnêtement possible, leurs besoins en matière d’accessibilité.

L’une des choses les plus importantes que vous pouvez faire pour des étudiant.e.s est de vouloir apprendre et collaborer. L’école et l’apprentissage tiennent souvent compte d’une seule façon d’acquérir des connaissances; un petit effort supplémentaire permet donc une plus grande progression. En outre, ne présumez pas que les gens mentent à propos de leur état ou d’un problème. Une telle prétention n’aide pas les gens à être pris au sérieux et à demander des mesures d’adaptation, mais elle écarte aussi la raison pour laquelle une personne agirait de la sorte dès le départ. Cette personne ne possède peut-être pas les compétences fondamentales requises et craint de poser des questions de peur d’être humiliée parce qu’elle agit de la sorte; elle décide donc de recourir à la tricherie. Au lieu de supposer la pire hypothèse, faites preuve de compassion et travaillez avec vos étudiant.e.s pour trouver une solution.

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Annexe

Le présent projet est rendu possible grâce à un financement du gouvernement de l’Ontario et au soutien qu’offre eCampusOntario à la Stratégie pour l’apprentissage virtuel.

Renseignements sur eCampusOntario

La société sans but lucratif eCampusOntario est financée par le gouvernement de l’Ontario. Il s’agit d’un centre d’excellence de l’apprentissage en ligne et assisté par la technologie pour l’ensemble des collèges et universités financés par des fonds publics de l’Ontario. Il a entrepris l’ambitieuse mission d’étendre l’accès aux études et à la formation postsecondaires en Ontario. Le présent manuel fait partie de la Bibliothèque libre d’eCampusOntario, qui offre des ressources d’apprentissages gratuites sur une vaste gamme de sujets. Ces manuels libres peuvent être choisis par le personnel enseignant pour des cours, téléchargés par des apprenant.e.s sur leurs appareils électroniques, ou imprimés. Il est possible de personnaliser ces ressources libres et gratuites pour répondre à un vaste éventail de besoins en matière d’apprentissage. Nous invitons le personnel enseignant à examiner ces ressources et à les adapter afin de les utiliser dans le cadre de cours.

Remarque à l’intention du personnel enseignant utilisant la présente ressource

Nous vous invitons cordialement à utiliser la présente ressource et à nous faire savoir si vous l’avez intégrée dans votre programme d’études. Nous vous prions de communiquer avec madame Allyson MacLean (amaclea3@uottawa.ca).